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"Françoise Sagan" : Caroline Loeb est le "charmant petit monstre" sur scène

"Charmant petit monstre", c’est le surnom que donna François Mauriac à Françoise Sagan quand elle publia en 1954 "Bonjour Tristesse" qui lui ouvrait les portes de la renommée. Caroline Loeb adapte sur scène au Petit Montparnasse à Paris les déclarations de l’écrivaine rassemblées dans son recueil "Je ne renie rien", dans "Françoise Sagan". Mis en scène par Alex Lutz, elle y incarne une vie.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 1 min
Caroline Loeb dans "Françoise Sagan"  de Caroline Loeb, d'après "Je ne renie rien" de Françoise Sagan
 ( Théâtre Montparnasse & Petit Montparnasse)

Les mots de Sagan

En 1954, Sagan avait 20 ans. Ce succès soudain, à l’odeur de soufre pour avoir écrit les émois d’une adolescente jalouse des conquêtes d’un père trop aimé, devait la suivre toute sa vie. La femme et ses affres - son goût pour le jeu, la vitesse (qui faillit lui coûter la vie), l’alcool, la drogue… - prit souvent le dessus de l’auteure, alors qu’elle n’était qu’écriture. Elle n’en prit pourtant pas ombrage, assumant ce statut de "scandaleuse" avec son élégance naturelle et d’esprit constante.
Etonnant de voir Caroline Loeb se glisser dans la peau de Françoise Sagan avec tant de connivence. Il ne s’agit pas de mimétisme, même si la panoplie est là : la silhouette gracile, les gestes, la perruque blonde, le corsage Hermès, les mocassins déchaussés, pieds nus sur scène… La diction si reconnaissable de Sagan aussi, sans pour autant relever de l’imitation. Ce sont les mots, les mots de Sagan qui trouvent vie dans son adaptation de déclarations faites au fil d’interviews données des années 50 à 90, et qui retracent le cours d’une vie très intérieure, et paradoxalement si médiatique.

Tact et sensibilité

La mise en scène d’Alex Lutz, que l’on n’attendait pas là, prend le parti d’un décor dépouillé sur fond noir, relevé de lumières qui dessinent, tels des pinceaux, la présence de la comédienne. Caroline Loeb occupe la scène de long en large et en profondeur, s’allonge sur le sol, s’accroupit sur un meuble, s’assoie, se lève, allume une cigarette… Nonchalamment, elle dit la vie, la vie de Sagan telle qu’elle l’a dite. Ses mots habitent l’espace.
L’écrivaine avait cette faculté, dans ses romans, ses pièces, ou ses articles, mais aussi ses interviews, de transmettre comme une métaphysique du plaisir, trouvé avant tout dans le partage et la générosité. Non pas un hédonisme, mais une quête, sinon une conquête sur les contraintes. Une mélancolie qui est comme une constance chez elle. Un talent d’écriture bien supérieur à cette "petite musique" à laquelle d’aucuns l’on souvent trop facilement réduite, et une qualité de propos qui va bien au-delà de la futilité. C’est cette dimension que Caroline Loeb transmet avec tact et sensibilité, pour faire revivre sur scène, présente, Françoise Sagan, la femme, l’écrivaine et son style. 
"Françoise Sagan" (Caroline Loeb) : l'affiche
 (DR)

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