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Enchères de la collection Aristophil : les manuscrits de Sade et Breton retirés de la vente

Le manuscrit des "120 Journées de Sodome" du Marquis de Sade et les Manifestes du surréalisme d'André Breton, lots phare de la première vente du fonds Aristophil, ont été classés trésors nationaux. Conséquence : leur sortie du territoire est interdite. L'administrateur de la liquidation a donné son accord pour que les lots concernés soient retirés de la vente.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Le manuscrit des "120 Journées de Sodome" du Marquis de Sade est l'un des lots phare de la vente du fonds Aristophil.
 ( Thibault Camus/AP/SIPA)

Les manuscrits de Sade et de Breton ont donc été classés trésors nationaux. Cette mesure interdit la sortie du territoire de ces documents exceptionnels qui devaient être proposés aux enchères mercredi 120 décembre lors de la première vente du fonds Aristophil. Ces pièces pourraient bientôt rejoindre les collections nationales. Le ministère de la Culture a en effet "proposé une négociation de gré à gré pour l'acquisition de ces oeuvres".

Les manuscrits de Sade et de Breton seront donc à priori retirés de la vente

Pour le commissaire-priseur Claude Aguttes, "ce classement démontre le caractère exceptionnel des collections Aristophil tout en garantissant le prix du marché international aux investisseurs". Parmi eux, de nombreux petits épargnants qui ont perdu leurs économies dans la faillite de la société.

Le manuscrit autographe des "120 Journées de Sodome ou l'école du libertinage" du Marquis de Sade est estimé de 4 à 6 millions d'euros. Le Divin Marquis l'a terminé dans sa cellule de la prison de la Bastille en 1784-85. Il se présente sous la forme d'un rouleau de 12,10 m de longueur, composé de 33 feuillets. Abandonné par Sade à la Bastille lors de son transfert à Charenton en juillet 1789, et acquis par Aristophil en 2014, ce manuscrit a connu un parcours particulièrement agité entre vol, vente illicite et procès.
Le manuscrit des "Manifestes du Surréalisme" d'André Breton, partie de la collection Arisophil.
 (Thibault Camus/AP/SIPA)
Quant à l'ensemble André Breton, il comprend le manuscrit original du Manifeste du Surréalisme (estimé entre 600.000 et 800.000 euros), le Second Manifeste du Surréalisme (entre un million et 1,2 million d'euros), ainsi que "Poisson soluble I et II", une série autographe rédigée dans sept cahiers d'écolier et comportant 114 essais d'écriture automatique (entre 2 et 2,5 millions). L'administrateur de la liquidation a donné lundi son accord pour que les cinq lots concernés soient retirés de la vente et que s'engagent les négociations de gré à gré entre la maison Aguttes et l'Etat.

Les autres lots de la vente

S'il est fort probable que Sade et Breton ne figureront plus dans le catalogue, cette première session proposera tout de même l'un des deux seuls manuscrits de Balzac encore en main privée. "Ursule Mirouët" (1841), roman repris dans le tome cinq de la "La Comédie humaine", est estimé entre 800.000 euros et 1,2 million d'euros.

Autres lots proposés : l'"Histoire d'Alexandre Le Grand" de Quinte Curce ou le récit manuscrit d'Helen Churchill Candee, rescapée du Titanic, une des sources d'inspiration du film de James Cameron.

Escroquerie

Créée en 2003, la société Aristophil proposait à des épargnants de devenir propriétaires de manuscrits - en pleine propriété ou en indivision -, manuscrits qu'elle pouvait ensuite racheter au bout de cinq ans à un prix majoré de 40% (soit un rendement de 8% par an). Au total, 850 millions d'euros ont été souscrits.Ce rendement devait être assuré par la prise de valeur des pièces sur un marché annoncé en pleine expansion et par la location de ces documents à des musées. Mais les enquêteurs soupçonnent que l'apport des nouveaux investisseurs servait en fait à payer ceux qui souhaitaient récupérer leur mise.

Pour des milliers de petits épargnants, cette première vente, qu'ils attendent depuis plus de deux ans, "est une étape cruciale", explique Jean-Marie Leconte, président de l'Association de défense des investisseurs en lettres et manuscrits (Adilema). "Il s'agit majoritairement de commerçants, d'artisans, de professions libérales qui ont été sensibles à l'argumentaire d'Aristophil leur disant qu'ils allaient contribuer à préserver la littérature française et constituer un pécule pour leur retraite", explique Jean-Marie Leconte: "Beaucoup ont perdu les économies d'une vie, leur retraite se transforme en cauchemar. Ils sont très demandeurs de ces ventes, ils sont à bout de ressources". Le président fondateur d'Aristophil Gérard Lhéritier a été mis en examen en mars 2015 pour escroquerie en bande organisée et pratique commerciale trompeuse.

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