"Fabriquer de la matière et du relief"
Après une enfance en banlieue parisienne, auprès d'un père informaticien et d'une mère employée de mairie originaires de la Martinique, Eric Charles-Donatien se forme à l'école d'arts appliqués Duperré, puis à l'école de la chambre syndicale de la couture. Ce qui l'intéresse, c'est "fabriquer de la matière et du relief". "J'ai toujours eu une affection particulière pour l'architecture et la sculpture", explique-t-il. Il fait une rencontre décisive : celle d'André Lemarié, alors à la tête de la maison familiale fondée en 1880, spécialisée dans le travail des plumes et des fleurs, et depuis acquise par Chanel.
Dans l'atelier de l'artisan plumier Eric Charles-Donatien 1
© Christophe ARCHAMBAULT / AFPMain dans la main avec les couturiers
Une expérience de 13 ans, au cours de laquelle il travaille avec des grands d'Alexander McQueen à Yves Saint Laurent en passant par Jean Paul Gaultier. Si pour cette saison automne-hiver 2018-19 qui a défilé sur les podiums parisiens du 1er au 5 juillet 2018, Christophe Josse n'a pas travaillé avec l'artisan, il est cependant un adepte de son travail de longue date et nous l'explique : ce qu'il cherche dans les plumes d'Eric Charles-Donatien ? "Tout... je recherche tout", nous explique Christophe Josse. "Au-delà des plumes, son talent, son oeil, la maîtrise de son art et sa quête d'excellence. Il sait sublimer une silhouette. (...) A chaque fois, c'est une surprise. Il renouvelle ses propos qui m’émerveillent à chaque fois, il sait m'interpeller et me rassurer. Son travail de plumes d'autruche glycérinées, par exemple, me sublime".
Collections Christophe Josse (2011 et 2018) avec le travail de plume d'Eric Charles-Donatien
© Courtesy of Eric Charles-DonatienUne plume moderne, plus attrayante
"Je pense qu'on a participé avec M. Lemarié à faire que la plume devienne plus attrayante pour les jeunes, plus moderne, continue à s'inscrire dans tous les défilés, pas seulement avec un boa autour du cou, pas seulement pour un spectacle de cabaret, et devienne une matière à part entière", explique Eric Charles-Donatien, designer de 46 ans qui a lancé son affaire en 2012.Dans son atelier, les plumes sont stockées dans des boîtes étiquetées, rangées par couleur ou par famille. Les plus utilisées sont l'autruche et le coq, puis l'oie et la dinde. Elles proviennent du sud-ouest de la France, d'Afrique du Sud, d'Argentine, et un peu d'Asie. Le plumassier doit aussi parfois composer avec la matière que les créateurs lui fournissent, par souci d'économie : "Tant que cela n'altère pas la qualité du travail que nous faisons, j'essaie de m'adapter. Mais je leur dis ne pas nous demander une Rolls-Royce au prix d'une 2CV !" ajoute-t-il.

Dans l'atelier de l'artisan plumier Eric Charles-Donatien
© CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP