Les adolescents se mettent à lire massivement, et compulsivement. Il faut alors assouvir leurs appétits de lecture avec des ouvrages de la même veine, concoctés avec les mêmes ingrédients : suspense, fantastique, amours, rebondissements, épisodes … Viennent alors "Twilight", "Hunger Games" et d'autres, pour finalement donner naissance à un nouveau rayon dans les librairies, d'abord anglo-saxonnes, puis françaises. Au début des années 2010, des auteurs français viennent aussi rejoindre les rayons de cette littérature baptisée "Young adult", qui s'adresse donc, comme son nom l'indique, à un lectorat jeune, entre 13 et 16 ans.

Rayon "Young adult" stand Robert Laffont, Salon Livre Paris 2017
© Laurence Houot / CultureboxLittérature de passage
Dans le public ce samedi au salon du livre, des jeunes adultes (surtout des filles d'ailleurs), mais aussi des curieux. Sur la scène, trois auteurs classés "young" : Victor Dixen "Phobos" (Robert Laffont), Stéphane Michaka "Cité 19" (Pocket Jeunesse) et Marie-Lorna Vaconsin "Le projet Starpoint" (La Belle Colère). Les trois auteurs tentent de définir le genre. "Les personnages ont l'âge des lecteurs", souligne Marie-Lorna Vaconsin, "C'est à cet âge que se produit le basculement vers un autre monde, qui est le monde adulte. Je ne choisis pas des personnages de cet âge pour plaire aux lecteurs", explique la jeune romancière, "mais parce que c'est un sujet qui m'intéresse depuis toujours. J'ai toujours rêvé de passer de l'autre côté du miroir", ajoute-t-elle.
Stephane Michaka dédicace "Cité 19" (Pocket Jeunesse) Salon Livre Paris 2017
© Laurence Houot / Culturebox"Une drogue"
Dans le public, Émilie et Mélanie, venues de Franche-Comté pour le Salon du Livre. "J'adore !", s'exclame Mélanie. "C'est une littérature qui ne se cantonne pas à un seul genre, on y trouve du fantastique, du réalisme, de la romance, et même des 'dystopies' … Et ce mélange des genres que j'aime bien !", explique-t-elle. "On est fans de "Phobos", le roman de Victor Dixen. Du coup on est aussi venues pour le voir, l'approcher, et aussi pour peut-être récolter quelques informations sur le prochain tome !", s'enflamme-t-elle."C'est un livre tellement addictif !", ajoute Mélanie. "Un suspense de malades ! Là, ce qu'il nous a fait à la fin du tome trois, c'est pas possible !", s'exclame-t-elle. Elles lisent d'autres genres, des biographies, confie Émilie, "mais c'est vrai que quand on a commencé à goûter à la 'Young Adult', ensuite, avec le reste, on a tendance à s'ennuyer. On cherche à retrouver l'état dans lequel ces livres nous ont plongées. C'est vrai, ça ressemble un peu à une drogue", conclut Mélanie.

Mélanie et Émilie, Salon Livre Paris 2017
© Laurence Houot / CultureboxLittérature ou marketing ?
Un peu plus loin, sur le stand Harper & Collins France et Harlequin, qui publient depuis longtemps ce genre de littérature , une longue file de lectrices attendent pour une dédicace. Ici, on connait bien son sujet. "Avec la 'Young adult', on va être plus sur quelque chose de 'soft', de 'sweat'", explique Sophie Lagriffol, éditrice. "Sur la 'New adult', on est sur un cahier des charges différent, avec des sujets plus ancrés dans le réel, avec des histoires d'amour plus intenses, plus engagées. L'action va se situer dans le monde professionnel ou à l'université. Et la grosse différence, c'est le sexe, qui va être beaucoup plus présent", souligne l'éditrice.
Sophie Lagriffol, éditrice chez Harper et Collins France
© Laurence Houot / Culturebox
Manon et Jessica, salon Livre Paris 2017
© Laurence Houot / Culturebox"Des livres qui peuvent faire réfléchir"
Sur le stand de Robert Laffont, qui a lancé en 2012 sa collection R, Magdalena, 26 ans, blogueuse, défend la littérature "Young adult". "Cela correspond à une niche, qui exprime une forte demande", souligne la jeune femme, "mais aujourd'hui on trouve vraiment de tout, des livres de pur divertissement, mais aussi des romans qui abordent des questions de société, et qui peuvent faire réfléchir. Par exemple, "A la place du cœur" (Robert Laffont, collection R) d'Arnaud Cathrine, est un roman qui raconte la naissance d'un premier amour à la veille de l'attentat à Charlie Hebdo. Mais il y en a plein d'autres, dans lesquels sont abordés toutes sortes de thématiques comme la maladie mentale, ou le harcèlement scolaire… Des thèmes qui peuvent accompagner les adolescents dans leur construction", insiste Magdalena.
Magdalena, bolgueuse spécialiste "Young adult"
© Laurence Houot / Culturebox"Rendre commercial ce qui ne l'est pas"
"Par exemple, Stéphane Michaka qui écrivait pour les adultes a eu envie d'écrire pour la jeunesse. Il a fallu convaincre les libraires pour qu'ils défendent ce roman pour la jeunesse, qui se déroule dans le Paris haussmannien du XIXe, et qui ne transige pas sur la langue, sur l'écriture. C'est aussi l'avantage de publier des livres en français, c'est de ne pas transiger sur la langue. Et nous, notre objectif, c'est de rendre commercial ce qui ne l'est pas. D'ailleurs Stéphane Michaka répète que son but est aussi de donner envie aux ados de lire les grands auteurs du XIXe siècle !".
Xavier D'Almeida, éditeur Pocket Jeunesse, découvreur de "Hunger Games"
© Laurence Houot / Culturebox