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"Les Misérables" d'Hugo et ses secrets de fabrication dévoilés par la Pléiade

Y a-t-il du nouveau à apprendre sur "Les Misérables", ce monument de la littérature française parmi les plus connus au monde ? La nouvelle édition du chef d'oeuvre de Victor Hugo qui sera publié dans une semaine par la Pléiade prouve que oui.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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  (Collection Gérard Pouchain )
Dirigé par Henri Scepi, un des spécialistes de la littérature française du XIXe siècle, ce nouveau volume de la prestigieuse collection de Gallimard fourmille de révélations. Ainsi, apprend-on que Victor Hugo hésita longtemps sur le titre même de son roman fleuve. Au départ, il songe à l'appeler "Les Misères" ou bien "Jean Tréjean", du nom de son héros. A mesure que l'histoire progresse, "Jean Tréjean" change d'identité. Il devient "Jean Vlajean" avant de prendre enfin, en mars 1861, le nom de "Jean Valjean", l'ancien forçat qui deviendra un saint laïc. "Marius", l'amoureux de "Cosette", autre personnage central du roman, devait s'appeler "Thomas", révèle encore Henri Scepi.
  (Collection Gérard Pouchain )

Lorsque Victor Hugo commence la rédaction des "Misérables", en 1845, il est membre de l'Académie française et pair de France (nommé par le roi Louis-Philippe). Les événements de 1848 (insurrection de février, puis Journées de Juin) l'obligent à abandonner son travail d'écriture. Élu député en juin 1848, réélu en mai 1849 dans les rangs conservateurs, il s'éloigne peu à peu de son camp jusqu'à dénoncer, le 2 décembre 1851, le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte.

L'exil 

Pourchassé par la police, il se voit contraint à l'exil. Le pair de France est devenu un proscrit. Hugo trouve refuge à Bruxelles puis à Jersey avant de s'installer à Guernesey. Les brouillons des "Misérables" dorment dans leurs cartons. Non pas que l'écrivain a renoncé à écrire. Au contraire. De son exil, il écrit "Les châtiments", puis "Contemplations" avant de rédiger "La légende des siècles". Amnistié mais toujours en exil, il reprendra l'écriture des "Misérables" en avril 1860, quinze ans après l'avoir commencé. Le livre, "un des principaux sommets, sinon le principal de mon oeuvre", écrit Hugo, est finalement publié à Bruxelles par un éditeur belge en mars 1862. L'écrivain a alors 60 ans.
  (Collection Gérard Pouchain )

Différentes ébauches

Le texte publié par la Pléiade se fonde sur cette édition originale publiée de mars à juin 1862. Outre le texte impressionnant d'Hugo, le volume de 1.824 pages est enrichi d'un "Atelier des Misérables" où ont été rassemblés les préfaces et projets de préfaces rédigés par Hugo mais aussi différentes ébauches qui permettent d'apprécier l'évolution de l'oeuvre au fil de sa longue rédaction. On peut comparer ainsi la scène au cours de laquelle Javert s'accuse auprès du respectable "M. Madeleine" (qui n'est autre que Jean Valjean) de l'avoir pris pour l'ancien forçat dans la version de 1846-1847 et celle de 1862. "Tout a été retravaillé avec un soin extrême en vue de ménager l'effet de suspens escompté", fait remarquer Henri Scepi. 
  (Collection Gérard Pouchain )

Critiques féroces

"L'Atelier des Misérables" comprend aussi les pages écartées du manuscrit, les scènes ou chapitres qui n'ont pas trouvé leur place dans l'édition publiée. Un volet intitulé "Images des Misérables", sous la direction de l'universitaire Dominique Moncond'huy, présente des dessins (dont ceux de Victor Hugo) inspirés du roman et dresse également un inventaire complet des films, pièces de théâtre adaptés de l'oeuvre d'Hugo dont la célèbre comédie musicale "Les Misérables" jouée sans interruption à Londres depuis 1985. Des adaptations ont été réalisées pour le cinéma japonais, égyptien, turc ou encore vietnamien, nous apprend la Pléiade.
  (Collection Gérard Pouchain )

Quant à la réception du roman, le lecteur d'aujourd'hui ne manquera pas d'être étonné. Certes, le livre connaît un succès commercial dès sa parution, rappelle Henri Scepi, mais les critiques sont féroces. Flaubert et Lamartine cognent à coeur joie sur le texte d'Hugo. La mère d'Arthur Rimbaud écrira une lettre indignée au professeur du jeune Arthur, Georges Izambard, coupable selon elle d'avoir placé un exemplaire des "Misérables" dans les mains de son fils.


Le grand roman de Victor Hugo était entré une première fois dans la Pléiade en janvier 1951 et n'avait jamais été réédité depuis.
  (Gallimard)

 


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