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"Les Bronzés" ont 40 ans : interview du réalisateur Patrice Leconte de B à Z...

1978: une bande de trublions sort au cinéma sa pièce "Amour coquillages et crustacés" : "Les "Bronzés". Deuxième film de Patrice Leconte, il fait un tabac et devient culte ! A l’affiche nous ne connaissons qu’eux : Michel Blanc, Gérard Jugnot, Thierry Lhermitte, Christian Clavier, Josiane Balasko, Marie-Anne Chazel, Dominique Lavanant… En 7 lettres, Patrice Leconte redore leur "blazon", avec un Z.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Patrice Leconte à droite et la troupe du Splendid lors du tournage des Bronzés 3
 (JEAN MARIE LEROY / COLLECTION CHRISTOPHEL)

C’est la messe mercredi au Grand Rex à Paris : pour fêter les 40 ans des "Bronzés" dans le cadre du Festival d'humour de Paris. Sont projetés le film et sa suite de 1979 "Les Bronzés font du ski", en présence de Patrice Leconte, le réalisateur, et de Marie-Anne Chazelle. Evénement.

A cette occasion, Patrice Leconte à répondu à nos questions en égrénant les lettres du titre : "Les B.R.O.N.Z.E.S".

B. comme Bonheur

Culturebox : Après le tournage difficile de votre premier long métrage "Les Vécés étaient fermés de l’intérieur", celui des "Bronzés", c’était du Bonheur ?

Patrice Leconte : Oui, c’était évidemment heureux, parce qu’on était comme les sept nains de Blanche-Neige, eux six et moi, on était une bande de chouettes copains, comme on disait à l’époque. Mais je ne voulais pas donner l’impression que j’étais un réalisateur heureux. A l’intérieur j’étais tendu comme une arbalète. Tout simplement, parce que trois ans après l’échec des "Vécés étaient fermés de l’intérieur", je ne pouvais pas me ramasser une deuxième fois. Il fallait absolument que ce film soit réussi.

On n'aurait jamais pu imaginer un tel succès. 40 ans après, "Les Bronzés" est un film inusable... Mais lors du tournage, c’était un mélange très étrange, pas toujours confortable entre moi et moi. Entre le plaisir inouï de faire ce film, et l’inquiétude de me dire pourvu que ce soit réussi.
Patrice Leconte (2018)
 (Jacky Bornet / Culturebox)

R comme Répliques

C : De nombreuses répliques dans les dialogues des "Bronzés" sont devenues cultes, comment sont-elles apparues : elles étaient dans la pièce, elles sont venues à l’écriture du scénario, certaines ont été improvisées... ?

P. L. :  Avec l’équipe du Splendid, il n’y a pas d’improvisation, les trois films que l'on a fait ensemble sont très écrits. Et leurs propres dialogues sont respectés, à la virgule près. La seule chose à propos des répliques devenues cultes, "Planter du bâton" et autres, ne l’étaient pas quand on les a jouées, comment voulez-vous prévoir... Ce n’était pas prévu, écrit pour cela.

On ne peut pas s’attendre à cela. C’est merveilleux quand ça arrive. Cela veut dire que les films continuent à vivre, quand ils ne sont pas projetés, quand ils ne passent pas à la télé. Hors contexte, dans les cours d’école, dans les bureaux, autour de la machine à café, les gens emploient des termes, des formules, des réparties issues de ces films, cela est très flatteur, c’est quand même mieux qu’un coup de pied au cul…

O comme Osé :

C : Est-ce que "Les Bronzés" était un film osé à l’époque ?

P. L. : Si ça l’était à l’époque ou aujourd’hui, je n’en ai pas du tout conscience. On a fait le film, en totale insouciance, on ne se rendait pas compte si le film était subversif par rapport aux clubs de vacances, aux garçons, aux filles, au sexe, c’était naturel, c’était l’époque, on ne cherchait pas à être choquant du tout.

Ce qui était gonflé, c’était cet humour générationnel, issu du café-théâtre qui dépoussiérait l’humour d’avant, le burlesque, le comique troupier, Robert Lamoureux, tous nos maîtres que je respecte et auxquels je dois…

Le Club Med, emblématique, n’était pas très heureux du film. Tant que c’était au théâtre, le public était restreint, ça allait bien, mais au cinéma, avec un public plus large, Trigano (créateur du Club Méditerranée) était sur sa réserve. Ce qui ne l’a pas empêché bien des années après de me prendre comme réalisateur pour ses pubs, me disant "vous voyez, je ne suis pas rancunier". Ce que j’ai trouvé très chic.

N comme Nécessaire

C : Est-ce qu’il était nécessaire de tourner deux suites au "Bronzés" ?

P. L. : Quand on a fait le premier, tout de suite le producteur nous a dit, on va faire une suite, on ne va pas laisser ces personnages dans la nature. Nous on disait, pas question, on passe à autre chose. On va pas tomber dans le panneau de la suite, du numéro 2. Et en fin de compte, on s’est laissé fléchir, parce que c’était amusant de retrouver nos amis à la neige.

Je crois que le 2 est mieux, plus acide, plus méchant, il y a quelque chose… Après le trois, je ne sais pas… Après avoir dit qu’il n’y aurait jamais de 3, on l’a fait. Ce qui nous motivait, tous, c’était de savoir ce que tous ces personnages étaient devenus après tant d’années, c’était longtemps après le premier, c’était cela qui était intéressant.

Z comme Zeste

C. : Qu’est ce qui fait le zeste, la saveur des "Bronzés" pour qu’il reste autant dans les mémoires ?

P. L. : Je ne sais pas. Parce que s’il y avait une recette, tout le monde se ruerait dessus, et ça n’existe pas.

Par contre à partir des "Bronzés font du ski", il s’est construit quelque chose, un rapport très empathique, une sorte de famille, malgré leurs défauts. Il y a une sorte d'identification entre le spectateur et les personnages, je ne sais... Quant aux relations entre les personnages, parfois vachards, je n'y vois que des rapports entre des gens qu’on aime bien.

E comme Ecoute

C. : Etiez-vous à l’écoute de vos acteurs pendant le tournage, puisqu’ils étaient aussi les auteurs de la pièce à l’origine du film ?

P. L. : Tous étaient auteurs. Je respectais leur création, tous étaient à-même de savoir ce qu’il y avait à faire. Mais je n’étais pas seulement là pour enregistrer leurs facéties. C’était un travail très collectif. A aucun moment ils n’intervenaient dans la mise en scène. Mais ils avaient toujours à l’esprit ce qu’ils avaient à faire, et ils le faisaient bien, surtout.
Patrice Leconte et Jacky Bornet (2018)
 (Patrice Lecomte / Jacky Bornet / Culturebox)

S comme Sociétal

C : "Les Bronzés" peut-il être considéré comme une comédie sociétale ?

P. L. : Une des idées les plus communes, est que l’on parte en vacances. C’est assez sociétal en effet. Ce ne sont pas, qu’il s’agisse du 1, du 2 ou du 3, des films politiques, loin de moi, mais ils restent, chacun dans leurs créneaux des films sur comment l’on peut passer ses vacances, sujet universel et envisageable avec un œil. Ce que j’espère... et où l’on se retrouve.

Bonus  : un film avec Delon

C : Votre prochain projet ?

P. L. : Et bien je me rends compte que je n’ai pas sorti de film depuis trois ans, cela fait longtemps. Après deux projets avortés, mon prochain film devrait être avec Alain Delon et Juliette Binoche. Il m’a dit : "Je voudrais tourner mon dernier film avec vous". J’espère que cela ne sera pas son dernier film, mais c'est ce qu'il m'a dit. Nous sommes en production et le tournage est planifié. C’est en cours… 

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