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Cannes 2018 : une Palme en or pour "Une affaire de famille" de Hirokazu Kore-eda

La Palme d’or 2018 du 71e Festival de Cannes attribuée à "Une affaire de famille", du Japonais Hirokazu Kore-eda, couronne une carrière remarquable qui l’a vu passer six fois sur la Croisette. Le Grand prix du Jury est revenu à "BlacKKKlansman" de Spike Lee, alors que le prix du Jury récompensait le très beau "Capharnaüm" de Nadine Labaki. Un palmarès équilibré, revisité dans le détail.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Kore-eda Hirokazu avec sa Palme d'or pour "Une affaire de famille" au 71e Festival de Cannes (2018)
 (Arthur Mola/AP/SIPA)

Belle Palme d’or pour "Une affaire de famille"

Même si le préféré de la critique, "Leto", repart bredouille de cette 71e compétition cannoise, c’est une grande satisfaction de voir Hirokazu Kore-eda couronné d’une magnifique Palme d’or pour "Une affaire de famille", qui avait fort à faire face une sélection de haute tenue. C’était la sixième fois que le réalisateur japonais était sur la Croisette et la cinquième reprise en compétition officielle. 
Ce qui émerveille chez le réalisateur nippon, c'est cette extrême sensibilité et sa générosité envers ses personnages, sans une once de pathos et une direction d’acteurs des plus justes. L’appartement exigu, son encombrement, les repas – véritables rites de la vie familiale (on mange beaucoup dans le film) – et la promiscuité créent une chaleur humaine renforcée par la personnalité de ce couple stérile atypique, qui s’invente une famille. Le film n’a pas encore de date de sortie en France.

Le Grand prix du jury bien senti pour "BlacKKKlansman" de Spike Lee

Le Grand prix du Jury décerné à "BlacKKKlansman" de Spike Lee est une bonne surprise. Le film n’a pas fait l’unanimité, mais renoue, dans une sélection cannoise très élitiste, avec un cinéma plus abordable qui fait passer un message fort. Et l’on peut compter sur le cinéaste militant de la cause afro-américaine pour ne pas s’en laisser conter.
Il réussit le défi de faire rire sur un sujet grave, se payer la tête de Donald Trump, dans une belle mise en scène classique, certes, mais efficace, un peu à la Clint Eastwood (il ne serait peut-être pas très heureux de cette comparaison, mais bon…).

Le Prix du Jury au formidable "Capharnaüm" de Nadine Labaki

Nadine Labaki a reçu un un Prix du Jury attendu pour son "Capharnaüm". Attendu, car après sa projection, toute la Croisette parlait de ce film enthousiasmant, dur, et tourné avec les moyens du bord.  
Nadine Labaki et Zain Alrafeea dans "Capharnaüm"
 (Gaumont Distribution)
Nadine Labaki ("Caramel") confirme son grand talent de conteuse, de metteuse en scène et de directrice d’acteurs(trices) dans ce film coup de poing, sur un enfant révolté contre ses parents. Cette colère reflète l'opposition aux mœurs de la société libanaise déduites du Coran et de la tradition. Un prétexte également pour exposer le quotidien vécu à Beyrouth. Une réalité chaotique qui rend compte du désordre mondial, a-t-elle estimé en recevant sa Palme. La réalisatrice a eu de très beaux mots à propos de sa jeune actrice de 12 ans, Cedra Izam (Sahar dans le film) qui, en ce moment de joie à Cannes, devait sans doute laver des pare-brise sous la chaleur étouffante de Beyrouth, puis, rentrer chez elle, faire la vaisselle, la lessive familiale et préparer la cuisine…  "L'enfance maltraitée est à la base du malheur dans le monde", a-t-elle lancé sous les applaudissements.

Godard reçoit une Palme d’or spéciale

Une Palme d’or spéciale pour le spécial Jean-Luc Godard qui présentait en compétition "Le Livre d’image". Un film expérimental (on s’en doute), entre fiction et documentaire, sur l’état de la planète, et notamment l’histoire géopolitique des pays arabes, à la sauce Godard !.
Qu’on adhère ou pas, Godard est un des plus grands créateurs et novateur du 7e art. Son nouveau film est au cinéma ce qu’une installation dans une galerie d’art est à la peinture et la sculpture.

Beau prix d’interprétation masculine pour Marcello Fonte dans "Dogman" de Matteo Garrone

Inconnu, jouant pour la première fois un premier rôle à 39 ans dans le fantastique "Dogman" de Matteo Garrone ("Gomorra"), Marcello Fonte était d’une humilité réelle, à moitié feinte et comique, quand il a reçu sa Palme. "Je ne sais pas si je dois l’accepter", a-t-il murmuré, jusqu’à ce que la chanteuse burundaise Khadja Nin, membre du jury, se courbe devant lui pour la lui remettre !
L’acteur et réalisateur Roberto Benigni, qui officiait à la remise du trophée, déclarait avec son enthousiasme légendaire : "Je suis heureux comme une pastèque !".

La Palme de la mise en scène, méritée, à "Cold War" du Polonais Pawel Pawlikowski

Le réalisateur de "Ida", Pawel Pawlikowski a reçu la Palme de la mise en scène pour son magnifique "Cold War". Une récompense qui auréole le cinéma polonais, absent de Cannes depuis des lustres, après la présentation hors compétition de "Korczak" (1990) d’Andzej Wajda, lui-même Palme d’or en 1981 pour "L’Homme de fer".
D’une très grande beauté visuelle, au noir et blanc expressionniste dans un format carré, "Cold War", met au cœur de son sujet l’amour impossible entre un musicien et une chanteuse piégés dans la Pologne stalinienne. Cette guerre froide du titre est à la fois le contexte géopolitique de l’époque et celle entre deux amants torturés. Magnifique.

Une Palme du meilleur scénario ex aequo

C’est une double Palme qui récompense le meilleur scénario du 71e Festival de Cannes.
Adriano Tardiolo dans "Heureux comme Lazzaro".
 (Tempesta 2018)
Elle a été attribuée à la scénariste et réalisatrice italienne Alice Rohrwacher pour "Heureux comme Lazzaro", et à Nader Saivar accompagné du dissident iranien Jafar Panahi, également réalisateur de "3 Visages".
  (Memento Films Distribution)

La Palme de la meilleure interprétation féminine à la Kazakhe Samal Yeslyamova

Comme pour Marcello Fonte, meilleur acteur, l’actrice Samal Yeslyamova est inconnue, même si elle a joué dans le précédent film de Sergey Dvortsevoy, "Tulpan", réalisateur de "Ayka", qui lui vaut cette récompense. Elle est présente dans tous les plans d'un film psychologique particulièrement éprouvant.
  (Nord Ouest Films)

La Caméra d’or remise au Belge Lukas Dhont pour "Girl"

La Caméra d’or, qui récompense un premier ou deuxième film sélectionné dans toutes les sections confondues, officielles et parallèles, est revenu au réalisateur belge Lukas Dhont, pour "Girl".
L'envoûtant Victor Polster dans "Girl" du belge Lukas Dhont a reçu le prix d'interprétation pour Un Certain Regard.
 (Diaphana Distribution)
Le film, qui avait auparavant remporté le prix Un Certain Regard, raconte l’histoire d’un jeune garçon de 15 ans devenu une fille et qui rêve de devenir danseuse, avec le soutien de son père. Lors de sa projection, le film avait créé la sensation sur la Croisette.  

La Palme du court-métrage décernée à "All These Creatures"

La Palme du court-métrage est revenue au réalisateur australien Charles Williams pour "All These Creatures", qu’il a également scénarisé et dialogué.

Une mention spéciale est revenue au Chinois Shunju Wei pour "On the Border".

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