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Jean-Charles de Castelbajac évoque pour nous son ami Jean-Michel Basquiat, le "Petit Prince"

L'exposition consacrée à Jean-Michel Basquiat à la Fondation Louis Vuitton à Paris bat son plein. Le couturier Jean-Charles de Castelbajac a bien connu le peintre américain dans les années 1980. Il nous a reçu chez lui pour nous éclairer sur l'homme, qu'il qualifie de "Petit Prince", et sur sa peinture. Un entretien émouvant où il revient sur les circonstances de leur rencontre.
Article rédigé par Valérie Gaget
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Jean-Charles de Castelbajac à Paris en septembre 2017
 (LAURENT BENHAMOU/SIPA)
Entretien : Valérie Gaget, Alexis Jacquet, Julie Martin et Christian Indjeyan

Il nous attend assis à une table, au fond de son jardin parisien et nous conduit à l'intérieur de sa maison dans une pièce colorée, à l'image de sa mode. Sur les murs, du jaune, du rouge, du bleu. Un tableau de son ami Keith Haring. "Il adorait dessiner avec mes fils" raconte-t-il. Jean-Charles de Castelbajac est comme ça. Il a connu les plus grands artistes de notre époque et en parle en toute simplicité. Il dit avoir rencontré Jean-Michel Basquiat en 1984, quatre ans avant sa mort prématurée, par overdose, à l'âge de 27 ans. "J'avais repéré son travail novateur et je lui avais commandé un portrait en lui disant juste que j'aimais les motos". Quelques temps plus tard, il reçoit chez lui un tableau avec un personnage de motard dessiné à la craie blanche sur un fond noir, truffé de couleurs premières comme il les aime. Hélas, c'est sur un catalogue qu'il nous montre ce tableau aujourd'hui. Il a dû le vendre il y a plusieurs années pour renflouer ses finances. 
Le tableau peint par Jean-Michel Basquiat pour Jean-Charles de Castelbajac reproduit dans un catalogue
 (Valérie Gaget)
Jean-Charles de Castelbajac nous dit que pour lui, Basquiat était "un Petit Prince". "Je suis venu à New York et j'ai rencontré Jean-Michel "downtown", du côté de Soho. La première fois que je l'ai vu, il portait un grande chemise blanche. J'ai eu la vision de quelqu'un hors du temps". "Il y a une exploration métaphysique dans son travail que parfois il ne contrôle pas". 
Horn Players par Jean-Michel Basquiat (1983)
 (Estate of Jean-Michel Basquiat, licensed by Artestar, New York Photo: Courtesy of Douglas M. Parker Studio Los Angeles)

Comme un rébus

Le couturier fait le lien avec la musique, l'une des passions de Basquiat qui avait son propre groupe, baptisé Gray. "Dès que l'on voit un tableau de Jean-Michel, il y a une musique qui se met en place, une vibration, une intensité au delà de l'esthétique, quelque chose qui vous appelle". Jean-Charles de Castelbajac voit "une fulgurance" dans le travail de son ami. "Le SIDA, la mort sont omniprésents et ont profondément marqué sa peinture". "Il y a ce rythme effréné (...) comme si on remplissait le livre d'une vie avec des signes".  Il y a les signes liés à l'héritage de la rue, des codes presque tribaux. Et il y a des signes directionnels, ces flèches, "comme un rébus, un labyrinthe qui nous emmène vers l'inconscient". 
Anthony Clarke par Jean-Michel Basquiat (1985)
 (Estate of Jean-Michel Basquiat, licensed by Artestar, New York )

Une mystérieuse blonde

Dans les années 80, New York était une ville dure, gangrénée par la violence. Jean-Michel a certainement subi le racisme mais selon le couturier, "il le transforme, ce n'est pas un joug, ce n'est pas quelque chose qui le contraint". "Il brise ses chaînes artistiques et il invente". 

A la fin de notre entretien, Jean-Charles de Castelbajac raconte qu'un jour, Jean-Michel lui a posé un lapin. "Le lendemain, il m'a raconté qu'il avait été kidnappé par une blonde à la sortie de la galerie". Trente ans plus tard, il apprendra par hasard que cette mytérieuse blonde n'était autre qu'Agnès B. Il finit en nous avouant que Basquiat, torturé et accro à l'héroïne, trouvait certainement un peu de douceur dans sa famille.
"Un jour, je l'ai même trouvé endormi dans le lit de mon fils". 

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