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L'écrivain Andreï Makine élu à l'Académie française

L'écrivain d'origine russe Andreï Makine, qui avait reçu le prix Goncourt ainsi que le Médicis en 1995 pour "Le Testament français", a été élu jeudi à l'Académie française.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Andreï Makine le 23 novembre 2013 à Bucarest
 (Daniel Mihailescu / AFP)

Andreï Makine, 58 ans, a été élu au premier tour par 15 voix sur 26 votants. Il y a eu trois bulletins blancs et six bulletins marqués d'une croix, signe d'une opposition. Deux voix sont allées sur le nom d'Arnaud-Aaron Upinsky, un écrivain proche des milieux catholiques traditionalistes.

Il reprend à l'Académie le siège laissé vacant par l'écrivaine algérienne Assia Djebar, décédée le 6 février 2015. Huit candidats étaient en lice dont un lycéen de 15 ans, Valentin Ogier, qui n'a obtenu aucune voix. Il n'existe pas d'âge minimum pour se présenter à l'Académie qui n'accepte toutefois pas les candidats âgés de plus de 75 ans.

Bilingue depuis l'enfance

Né le 10 septembre 1957 à Krasnoïark, en Sibérie, Andreï Makine est bilingue depuis l'enfance grâce à une grand-mère française. Son premier roman, "La Fille d'un héros de l'Union soviétique", est paru en 1990. Il a marqué le point de départ d'une œuvre littéraire écrite en français - une langue qui le passionne - et parfois sous un pseudonyme, Gabriel Osmonde. Andreï Makine a écrit jusque-là seize ouvrages sous son nom et quatre sous son pseudonyme.

Installé à Paris, Andreï Makine a obtenu la nationalité française à la suite de l'obtention de son prix Goncourt en 1995. Une précédente demande lui avait été refusée en 1991.

"Le français m'a toujours baigné et encouragé"

"C'est tout naturellement que j'écris en français, et ce depuis mon arrivée en France" en 1987, confiait Andreï Makine au "Figaro" au début des années 2000. "Le français m'a toujours baigné et a encouragé, stimulé mon amour pour la littérature française", dit le romancier, qui défend une conception rigoriste de la langue, ne supportant pas plus le "verlan" qu'une grammaire approximative.

À son arrivée en France, le Russe natif de Sibérie est nourri de sa vision mythique de la France, transmise en même temps que la langue par sa grand-mère d'origine française. La réalité sera bien sûre très différente mais cela ne le découragera pas, bien au contraire.

Makine connaît la précarité, écrit, envoie ses manuscrits et se heurte aux refus répétés des éditeurs. Pour faire éditer ses deux premiers romans, "La fille d'un héros de l'Union soviétique" (1990) et "Confession d'un porte-drapeau déchu" (1992), il fait croire qu'ils ont été traduits du russe en inventant un traducteur imaginaire.

Nouvelle déception : sa première demande de nationalité française en 1991 est rejetée. "C'était humiliant pour moi, qui suis imprégné de culture française. Mais je ne veux pas me plaindre. Je n'avais pas de domicile ni de travail fixes. Ils avaient sans doute raison", analysera-t-il par la suite.

Son quatrième roman lui apporte la reconnaissance

Son quatrième roman, "Le testament français" (1995) lui ouvre les portes de la notoriété. Il reçoit le Goncourt et le Médicis ainsi que le Goncourt des lycéens.

L'année suivante, Makine obtient enfin la nationalité française. En 2005, le romancier a reçu le prix Prince Pierre de Monaco pour l'ensemble de son oeuvre et en 2014 le prix Mondial de la Fondation Simone et Cino del Duca-Institut de France.

Son dernier roman, "Le pays du lieutenant Schreiber" (2014) retrace l'histoire de Jean-Claude Servan-Schreiber, officier français et résistant au nazisme, tombé dans un quasi-oubli. Comment cela est-il possible, s'interroge Makine qui, à l'instar des académiciens Alain Finkielkraut ou Max Gallo, s'inquiète d'un possible délitement de l'identité française et d'une perte de mémoire collective. Ce thème, il l'avait déjà abordé dans "Cette France qu'on oublie d'aimer" (2006) où il fustigeait la tendance française à l'auto-dénigrement.

Un an de patience avant d'endosser les habits d'Immortel

Élu à l'Académie française, Andreï Makine devra être reçu par le président de la République, "protecteur de l'Académie", pour être considéré comme faisant vraiment partie de la Compagnie. Il devra ensuite patienter pendant au moins un an avant de revêtir l'habit vert et d'être officiellement reçu sous la Coupole.

Un mot du dictionnaire lui sera alors attribué. Celui de Hélène Carrère d'Encausse, également d'origine russe et secrétaire perpétuel de l'Académie, est "lexicographie".

Le dernier reçu, Alain Finkielkraut a reçu le mot "variété". En attendant l'intronisation d'Andreï Makine, un autre académicien, Marc Lambron, élu à l'Académie en juin 2014, sera officiellement reçu sous la Coupole le 14 avril prochain.

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