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Un éblouissant "Lac des cygnes" en avant-première pour les moins de 28 ans

Pour la deuxième saison et pour attirer de nouveaux publics, l’Opéra national de Paris propose des avant-premières aux moins de 28 ans au prix de 10 euros. Exceptionnellement, nous avons été autorisés à nous glisser dans la foule de ces jeunes venus découvrir le ballet des ballets, Le Lac des Cygnes. Une soirée inoubliable à tout point de vue.
Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le Lac des cygnes à l'Opéra Bastille
 (Ann Ray/Opéra national de Paris)

19h aux abords de l’Opéra Bastille, alors que la nuit est déjà d’encre, on se croirait devant une boîte à la mode un samedi soir, ou dans la queue d’un casting d'une pub pour une assurance vie ! Une foule sonore, bavarde, souriante, afflue sous les portiques de sécurité.

"C'est un rêve de gosse de voir ce ballet"

Emmanuel et Lucas, étudiants en architecture, ont entrainé dans leur sillage plusieurs amis dont Lisa, 21 ans, aux anges, c’est son premier ballet : « C’est très intéressant de démocratiser les arts élitistes, de donner l’accès aux plus jeunes à des tarifs convenables ». Lisa étudie l’italien et les sciences politiques à la Sorbonne : « C’est la première fois qu’on vient tous ensemble. J’adore Tchaïkovski, c’est un rêve de gosse de voir ce ballet, autant pour la musique que pour les chorégraphies ».  
Igor (à gauche), Manu et Marie à gauche
 (Culturebox)

Ce soir ils auront droit à une représentation en tous points comme les autres à une différence près : ils devront montrer patte blanche, en clair leur carte d’identité. Un coup de tampon sur nos billets « accord de la direction » finit par convaincre le vigile suspicieux de nous laisser passer.
 
« C’est mon premier ballet nous lance Igor surexcité. C’est génial ! Ça coute le prix d’un cinéma, sinon on ne viendrait pas ». Une seule inquiétude pour cet étudiant en droit de 23 ans, « le placement aléatoire ».
 
A l’entrée de la salle nous croisons le directeur de l’opéra Stéphane Lissner, à l’initiative de ces avant-premières qu’il avait instaurées à la Scala de Milan. « C’est plein, se réjouit-il, nous ouvrons ainsi 13 ou 14 soirées par an. Ça représente entre 25 000 et 28 000 spectateurs. En général il y a huit productions lyriques et cinq ballets, dont un grand classique. La moitié des places sont vendues sur internet, en 20 minutes, l’autre moitié est réservée à des écoles des quartiers défavorisés ou des associations ».  
Stéphane Lissner le 5 décembre 2016 à l'opéra
 (Culturebox)

Soudain le rideau s’ouvre sur le chef-d’œuvre de Tchaïkovski. Il ne faudra que quelques minutes pour que la poésie du Lac envoûte Bastille plein comme un œuf.
 
Les amours déchirantes d’Odette et du prince, Mathieu Ganio et Amandine Albisson, semblent toucher au cœur la génération 2.0, comme elles ont touchés les générations précédentes. Quand Léonore Baulac, Hannah O’Neil et Germain Louvet se lancent dans le pas de trois, les applaudissements crépitent avant même la fin du mouvement. Tout comme est salué la virtuosité de François Alu dans le rôle du précepteur Rothbart. Et pourtant l’assistance ne connaît pas encore vraiment cette génération de jeunes danseurs.


"Un ballet intemporel"

A l’entracte Cléa et Marie (qui a vu la saison dernière "Roméo et Juliette" et "Le Corsaire") s’enthousiasment : « On découvre tout un univers ». « C’est vraiment un ballet intemporel » se réjouissent quatre jeunes filles qui ne quitteront pas leurs fauteuils : « On est venus directement à l’Opéra prendre des places pour avoir plus de chance d’être à côté les unes des autres. On est arrivé une heure et demie avant l’ouverture disent-elles, ravies d’être dans le parterre de l’orchestre.  
  (Culturebox)

Deux heures et demie plus tard, les applaudissements auront la puissance d’un orage de grêle. Pierre, apprenti ébéniste de 22 ans, sort tout sourire : « C’était très impressionnant techniquement et tout de même un peu kitch. Celui qui dansait en noir (François Alu) m’a le plus touché, il était plus acrobatique, il avait plus de lancer de jambes. C’est rare de pouvoir venir à l’Opéra Bastille. Ça me donne envie de revenir ».  
Pierre, apprenti ébéniste
 (Culturebox)

« J’ai vu le Casse-Noisette il y a deux ans, j’avais adoré, confie Gaëla. J’ai guetté les ballets, c’était vraiment féérique ce soir, ça transporte. C’est vraiment du plaisir pour les yeux et les oreilles ».
 
Marianne est venue de Reims avec ses frères et une amie : « Moi j’ai dû faire quatre semaines de danse classique quand j’étais petite fille, plaisante-t-elle, j’ai vraiment aimé, c’est mon côté rêve de princesse ».
Coralie-Anne à gauche, Marianne et ses deux frères à droite
 (Culturebox)

"Les ballerines étaient copiées-collées"

On était au premier rang renchérit son frère, c’était impressionnant de voir les cygnes danser tous ensemble. Les ballerines étaient copiées-collées ! Il faut qu’on se dépêche de profiter de cette opportunité car on approche des 28 ans ! ». Autre son de cloche du côté de Coralie-Anne (qui prépare une thèse en neuroscience) : "Ça m’a confortée que je préfère l’opéra à la danse. J’ai beaucoup aimé "Les Contes d’Hoffmann", "Don Giovanni", "Moise et Aaron". Et aussi le programme "Iolanta/Casse-Noisette" qui réunissait dans la même soirée un opéra et un ballet.  
 
Quant à nous qui connaissions notre Lac des cygnes et qui l’avons revu avec la même délectation que les fois précédentes, nous étions tout autant soulevés par l’enthousiasme. Au moment où le méchant Rothbart s’empare du gentil cygne, Odette, nous avons eu le coeur serré, comme nos jeunes voisins, avec le sentiment de retrouver nos 28 ans ou moins peut-être… Une initiave qui devrait donner des idées aux théâtres privés en mal de rajeunissement du public.


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