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Danielle Darrieux : mort de l'égérie du cinéma français

L'actrice française avait fêté ses 100 ans le 1er mai dernier. Elle représentait aux côtés de Micheline Presle et Michèle Morgan, décédée l'an dernier, une certaine idée du cinéma français. Elle était l'incarnation de l'élégance à la française. Celle que l'on appelait "La fiancée de Paris" est décédée le 18 octobre à son domicile de Bois-le-Roy, en Normandie.
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Danielle Darrieux au Théâtre du Chatelet, lors de la cérémonie des Césars (2002). 
 (JEAN-LOUP GAUTREAU / AFP)

"Je suis née le jour même où partout en France on vend du muguet", s'amusait, dans ses souvenirs, cette actrice aux 103 films et à la trentaine de pièces, archétype de la beauté féminine pour toute une génération.

Danielle Darrieux vivait dans l'Eure à Bois-le-Roy, avec son compagnon Jacques Jenvrin. Selon son entourage, elle n'était "plus en mesure de se déplacer". "C'est un phénomène unique en son genre. Quelle autre actrice en France et dans le monde peut se targuer d'avoir débuté sa carrière à 14 ans à peine pour la finir à l'âge de 93 ans ?", s'interroge Clara Laurent dans son livre qui vient de sortir "Danielle Darrieux, une femme moderne" (éd Hors-Collection). 

Récit Valérie Gaget et Sophie Jouve

Actrice dès l'âge de 14 ans 

Née le 1er mai 1917 à Bordeaux, Danielle Darrieux, fille d'un ophtalmologiste, élevée dans une famille de mélomanes, a été l'inoubliable partenaire de Charles Boyer dans "La ronde" (1951), de Jean Gabin dans "La Vérité sur Bébé Donge" (1953) ou de Gérard Philipe dans "Le Rouge et le Noir" (1954). L'actrice et chanteuse, dont la moue boudeuse faisait la joie des photographes, a aussi tourné aux États-Unis, comme dans "L'affaire Cicéron" de Joseph Mankiewicz, en 1952.
L'artiste aux débuts cinématographiques précoces souffle ses quatorze bougies sur le plateau de son premier film "le Bal", de Wilhelm Thiele en 1931. Dans ces années 30, elle incarne avec une grâce piquante les jeunes filles insouciantes. Elle devient alors l'une des rares Françaises à mener une carrière internationale : Allemagne, Tchécoslovaquie, Hongrie. "J'allais au studio comme on va à l'école, j'étais paresseuse et je le suis restée. Je n'étais qu'une jeune fille alors que les autres filles de mon âge jouaient déjà à la vamp", disait-elle.

Egérie du cinéma d'avant-guerre

Ce fut peut-être l'une des clés de son succès. De "Mayerling" (1935), son premier rôle tragique, à "Battements de coeur" (1939) d'Henri Decoin, son premier mari, elle est la coqueluche de l'avant-guerre, d'autant qu'à ses talents de comédienne s'ajoute une très jolie voix, comme dans "Retour à l'aube" (1938), d'Henri Decoin, dans lequel elle inteprète "Dans mon coeur". On l'appelait alors DD. On la surnommait aussi "la fiancée de Paris".
Vittorio de Sica et Danielle Darrieux dans Madame de...
 (Ronald Grant)
Le succès mondial de "Mayerling" lui ouvre les portes d'Hollywood. Après avoir signé un contrat de 7 ans avec les studios Universal, elle tourne "The Rage of Paris" ("La coqueluche de Paris") avec Douglas Fairbanks Jr, en 1938. 

"Femme amoureuse" 

Mais, très vite, DD s'ennuie et, au bout d'un an, rentre en France. Elle divorce en 1941, se remarie en 1942 avec le diplomate milliardaire et play-boy dominicain Porfirio Rubirosa. L'actrice n'interrompt pas son activité en France sous l'Occupation, tournant pour la Continental, la société de production allemande installée à Paris. Elle fait partie du fameux voyage à Berlin en 1942 avec d'autres acteurs français. "Femme amoureuse", selon ses mots, elle dit avoir accepté cette "invitation" pour voir Rubirosa, qui, soupçonné d'espionnage, venait d'être arrêté par les Allemands.

DD passe la fin de la guerre en résidence surveillée à Mégève. Elle se marie à nouveau en 1948 avec le scénariste Georges Mitsinkidès et commence une seconde carrière, notamment dans "Madame de..." et "Le Plaisir" (Max Ophüls). Elle enchaîne les films ("Les Demoiselles de Rochefort", "Le cavaleur"...) et, à la scène, triomphe à Broadway en 1971 dans une comédie musicale sur Coco Chanel.

Négligée par la Nouvelle Vague 

Alors que les cinéastes de la Nouvelle Vague lui tournent le dos, Danielle Darrieux reconquiert le public grâce au théâtre. On se souvient notamment des "Amants terribles" en 1973 ou encore de "Adorable Julia" en 1987. En 1995, elle reprend, entre tours de chants et séries télévisées, le rôle de la merveilleuse septuagénaire dans "Harold et Maude". En 2003, elle interprète seule en scène "Oscar et la dame rose" (d'Eric-Emmanuel Schmitt), qui lui vaut un Molière de la meilleure comédienne.
Danielle Darrieux aux côtés de Catherine Deneuve dans "Le lieu du crime" (1986) 
 (T. FILMS / FILMS A2 / ARCHIVES DU 7EME ART / PHOTO12)
Danielle Darrieux a inspiré les jeunes réalisateurs comme François Ozon ("Huit femmes", 2002). "C'est la seule femme qui m'empêche d'avoir peur de vieillir", disait Catherine Deneuve, partenaire dans ce film.


A l'annonce de son décès, de nombreuses réactions et témoignages de ceux qui l'ont connue ainsi que d'anonymes ont afflué.

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